Écrire à partir de l’image (3)

Brunoy, Essonne, le non-film : Il existe des films quand, enfant, j’habitais avec ma famille aux États-Unis (de New York, de l’Ouest, des chutes du Niagara), mais aucun de la ville quand nous vivions en France, en banlieue, à une demi-heure de Paris (hormis des séquences familiales en bas de l’immeuble ou dans le jardin de la maison). Personne n’a filmé Brunoy.

Lors de mon dernier séjour non plus, je n’ai pas filmé l’école primaire pour garçons reconvertie en médiathèque, la gare, la Grand-Rue, le Monoprix, le lycée Talma qui s’est dégradé, la piscine municipale en réfection, la pyramide et quelques autres lieux emblématiques. À peine quelques photos.

La ville existe, mais hors du cadre des images. La mémoire aussi.(Walter Benjamin : L’histoire se désagrège en images. L’image est l’intervalle rendu visible, la ligne de fracture entre les choses.)

La ville que, familialement, amicalement, amoureusement, nous n’avons jamais filmée, nous n’y avons pas pensé. Dans laquelle j’ai grandi, vécu, j’y suis revenu pour fermer la maison, la transmettre. Ville où je ne reviendrai pas sauf raison qui m’échappe, raison de mémoire, mémorielle.

À moins de prendre le RER ligne D pour arpenter les rues, me recueillir auprès d’un certain magnolia. Ou d’écrire avec elle ou à partir d’elle à nouveau, en la nommant ou non. Trop grand morceau de temps pour qu’elle ne soit pas entre les mots, même éloignés.

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